Même si depuis longtemps, le métier du pharmacien ne se limite pas à la préparation et la dispensation d’ordonnances médicales, les autres missions du pharmacien d’officine ont été beaucoup mieux définies par la loi HPST du 21 juillet 2009 qui donne un cadre de travail précis à toutes les activités de soins.
Nous nous appuierons sur ce texte pour présenter les missions afférentes au pharmacien d’officine en suivant le découpage proposé : tout d’abord les missions qui s’imposent à tout pharmacien, puis les autres missions (L 5125-1-1A du CSP).
Nous en profiterons pour faire un aparté sur les missions exceptionnellement confiées au pharmacien d’officine durant la crise sanitaire liée à la COVID-19, celles qui vont perdurer, et celles nouvellement apparues dans la Convention nationale pharmaceutique signée le 9 mars 2022.
Les missions de premier ordre
Même si depuis longtemps, le métier du pharmacien ne se limite pas à la préparation et la dispensation d’ordonnances médicales, les autres missions du pharmacien d’officine ont été beaucoup mieux définies par la loi HPST du 21 juillet 2009 qui donne un cadre de travail précis à toutes les activités de soins.
Nous nous appuierons sur ce texte pour présenter les missions afférentes au pharmacien d’officine en suivant le découpage proposé : tout d’abord les missions qui s’imposent à tout pharmacien, puis les autres missions (L 5125-1-1A du CSP).
Les missions de premier ordre
Les soins de premier recours
Le pharmacien doit tout d’abord contribuer aux soins de premier recours, tels que définis dans le code de la santé publique (L. 1411-11) :
- La prévention, le dépistage, le diagnostic, le traitement et le suivi des patients ;
- La dispensation et l’administration des médicaments, produits et dispositifs médicaux, ainsi que le conseil pharmaceutique ;
- L’orientation dans le système de soins et le secteur médico-social ;
- L’éducation à la santé.
Suite à la publication de l’arrêté du 1er août 2016 déterminant la liste des tests qui ne constituent pas un examen de biologie médicale, les pharmaciens d’officine sont autorisés à réaliser, dans un espace de confidentialité, trois tests de dépistage :
- Test capillaire d’évaluation de la glycémie (dans le cadre d’une campagne de prévention du diabète) ;
- Test oro-pharyngé d’orientation diagnostique des angines à streptocoque du groupe A ;
- Test rapide d’orientation diagnostique (TROD) des virus de la grippe, de la COVID-19 et des infections à VRS seul ou associé ;
- Test urinaire de recherche a minima de nitriturie et de leucocyturie.
Le pharmacien d’officine, formé au préalable, sera en mesure de réaliser un TROD oropharyngé à streptocoque du groupe A. Cela permettra notamment d’éviter la dispensation d’un antibiotique dans le cas d’une angine virale et de contribuer à la lutte contre l’antibiorésistance. La réalisation de ce test se fera dans deux situations :
- Sur initiative du pharmacien après évaluation des critères cliniques et détermination du score de Mac Isaac supérieur ou égale à 2.
- Sur prescription d’un médecin, à l’issue d’une consultation médicale à l’aide d’une ordonnance conditionnelle.
Des campagnes nationales telles que l’opération annuelle « Moi(s) sans tabac », Octobre Rose pour la prévention du cancer du sein, ou encore la campagne nationale de dépistage du diabète sont des mesures d’éducation à la santé.
À noter que le pharmacien d’officine est accompagné dans ses actions de prévention par le CESPHARM (le Comité d’éducation sanitaire et sociale de la pharmacie française) qui a pour vocation d’aider les pharmaciens à s’impliquer dans la prévention, l’éducation pour la santé et l’éducation thérapeutique du patient. Cette direction du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens fournit notamment de la documentation à destination des patients.
On peut également signaler le site PharmaReco qui propose des arbres décisionnels d’aide à la prise en soins des patients à l’officine.
Toutes ces opérations officinales n’ont de sens que si elles permettent une orientation des patients dans le système de soins, qu’il soit libéral ou hospitalier. Le pharmacien est ainsi un acteur incontournable pour répondre aux demandes de soins non programmées, puisque 40% des patients qui franchissent les portes des officines ne sont pas allés voir d’autres professionnels de santé avant de solliciter les conseils des membres de l’équipe de la pharmacie.
La coopération entre professionnels de santé
La coopération entre professionnels de santé est centrale et essentielle, car toute activité du pharmacien au service du patient ou de la santé publique n’a de sens que si elle est reliée à un principe général qui pourrait s’énoncer ainsi : « travailler ensemble au service du patient ». À cette fin, le pharmacien dispose de plusieurs outils.
En tout premier lieu, le dossier pharmaceutique (DP), qui est un parfait outil de coopération d’une part entre officinaux, d’autre part avec les services d’accueil des urgences y ayant accès. En effet, sur ce document électronique, figure l’historique médicamenteux de l’année écoulée, ce qui en fait un instrument de lutte contre la iatrogénie. Y figure aussi l’historique vaccinal qui reste visible 21 ans, ce qui rend le DP indispensable à la prévention de grandes maladies infectieuses. Désormais, l’ouverture du Dossier Pharmaceutique est automatique, sauf opposition de la personne. Malheureusement, il n’est pas accessible à l’ensemble des autres professionnels de santé.
Ce qui n’est pas le cas de “mon espace santé”, successeur du dossier médical partagé (DMP) . Cet outil, lisible par tous les professionnels de santé (un accès total ou partiel sera octroyé selon les métiers et selon l’avis du patient) est alimenté également par chacun d’entre eux ou par le patient lui-même, qui en garde à tout moment le contrôle. Le pharmacien l’alimente, entre autres, par l’intermédiaire du DP, mais peuvent y figurer également des compte-rendus hospitaliers ou radiologiques, des analyses biologiques, des informations de diagnostic ou d’allergies, etc. Afin de préserver ce secret professionnel et favoriser les échanges entre professionnels de santé, le pharmacien s’assure d’utiliser pour ces échanges, une messagerie sécurisée de santé qui permet des échanges d’informations protégés avec l’accord du patient (par exemple Mailiz®, proposée par les Ordres professionnels). Ces messageries sécurisées sont par exemple obligatoires dans le cadre de l’exercice pluriprofessionnel en équipes de soins primaires (ESP), en maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP), voire en communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS).
La permanence des soins
Une des missions de cet exercice pluriprofessionnel est de rendre possible la permanence des soins. Toute personne doit pouvoir, à tout moment, bénéficier des soins de professionnels de santé organisés pour assurer la permanence de ces soins. Dans ce cadre, le pharmacien d’officine participe en particulier au service de garde. En outre, sa répartition démo-géographique exemplaire, ses compétences en conseils en santé et sa disponibilité en libre-accès sont un garant de cette permanence des soins.
Actions de veille et de protection sanitaire
Le pharmacien doit aussi concourir de manière plus exceptionnelle aux actions de veille et de protection sanitaire. Dans ce cadre, il participe à des actions de protection collective de la population dans le cadre d’épidémies, d’accidents chimiques ou nucléaires de manière coordonnée avec les autorités compétentes.
Là encore, son rôle a été mis en exergue lors de la pandémie de COVID-19. Les équipes officinales ont été mobilisées de toute part pour assurer une distribution des équipements de protections individuels (principalement des masques), d’abord aux professionnels de santé, puis à la population fragile.
Le pharmacien est tenu de déclarer les potentiels effets indésirables liés à des médicaments (pharmacovigilance, pharmacodépendance), des dispositifs médicaux (matériovigilance) ou tout autre produit de santé (cosmétovigilance). Ceci constitue une obligation légale.
Le pharmacien se doit de rédiger des fiches d’intervention pharmaceutique dès lors qu’il identifie un problème lié à la thérapeutique médicamenteuse au moment de l’analyse pharmaceutique des prescriptions du patient. Ces fiches permettent une traçabilité des interventions réalisées par le pharmacien.
Missions facultatives
L’accompagnement des patients chroniques
Depuis quelques années, les pharmaciens d’officine participent également à des actions d’accompagnement ou d’éducation thérapeutique du patient (ETP).
La plus ancienne de ces missions consiste en la réalisation d’entretiens pharmaceutiques. Trois domaines comportant des risques importants pour la santé des personnes concernées ont été définis :
- La prise de médicaments anti-vitamine K ;
- La prise de médicaments anticoagulants oraux directs ;
- La maladie asthmatique.
Dans ces trois domaines, il s’agit de suivre au long cours les patients concernés en développant chez eux une meilleure connaissance des pathologies et de leurs traitements tout en favorisant une conduite autonome et responsable. Le suivi de ces patients est réalisé bien sûr de manière coordonnée avec les autres soignants (médecins généralistes ou spécialistes, infirmières, etc.) qui sont tenus informés de ces entretiens.
Dans le même esprit, mais de manière plus récente et encore plus approfondie, les pharmaciens d’officine réalisent des bilans partagés de médication (BPM). Il s’agit d’entretiens programmés qui concernent des patients âgés et polymédiqués chez qui le risque iatrogénique est élevé. En 2021 sont apparus les entretiens permettant l’accompagnement des patients sous anticancéreux oraux.
Au cours de ces deux types d’entretiens, le pharmacien recueille des informations à la fois personnelles, clinique ou biliologiques ; ces informations peuvent concerner l’observance, les difficultés techniques ou cognitives rencontrées par le patient. Toute cette collecte conduit à une analyse partagée avec le patient et transmise à son médecin traitant à qui le pharmacien peut soumettre des pistes d’amélioration de prise en charge. Les entretiens dédiés aux thérapies anticancéreuses seront un moment opportun pour analyser les potentiels effets indésirables ressentis chez le patient.
De manière plus récente, et à l’opposé des précédents entretiens pharmaceutiques relativement longs, qui doivent se dérouler dans un local de confidentialité en plusieurs étapes, les pharmaciens peuvent réaliser des entretiens courts dans deux cas de figure :
Vaccinations
Les pharmaciens peuvent désormais prescrire (à l‘exception des vaccins des vaccins vivants atténués chez les personnes immunodéprimées) et administrer l’ensemble des vaccins mentionnés dans le calendrier des vaccinations en vigueur chez les adultes et les enfants de plus de 11 ans.
Ils peuvent aussi prescrire et administrer, dans ou hors des recommandations vaccinales:
- Les vaccins contre la grippe saisonnière aux personnes âgées de onze ans
- Les vaccins contre la covid-19 aux personnes âgées de cinq ans et plus
Ceci nécessite une formation préalable, incluse dans la formation initiale des nouveaux étudiants (voir FAQ de l’Ordre).
Autres modalités :
Le pharmacien référent en EHPAD
Le pharmacien peut également travailler comme pharmacien-référent d’EHPAD (Établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) non muni d’une pharmacie à usage intérieur. Dans ce cadre, il collabore à l’élaboration de mesures de prévention en direction des populations âgées. Le pharmacien référent doit être le garant de la sécurité du circuit pharmaceutique au sein de l’EHPAD sous la direction du chef d’établissement.
Il travaille tout particulièrement sur la prévention de la iatrogénie, le bon usage des médicaments et l’amélioration de la couverture vaccinale. Si son activité est principale dans les EHPAD, elle peut également s’étendre à d’autres structures médico-sociales telles que les MAS (Maison d’accueil spécialisée), foyers d’accueil, etc.
Le pharmacien correspondant
Le pharmacien d’officine peut être désigné comme « pharmacien correspondant » par le patient dans le cadre d’un exercice coordonné (équipe de soins primaires, CPTS, centre et maison de santé). À ce titre, ils peuvent, à la demande du médecin ou avec son accord, renouveler périodiquement des traitements chroniques et ajuster, au besoin, leur posologie. Cette mission est encore en cours de mise en œuvre. Elle tend à se développer notamment au travers d’expérimentations régionales dans des territoires fragiles (désertification médicale).
La télésanté à l’officine
Depuis le 6 décembre 2018, les pharmaciens sont en mesure de proposer des téléconsultations médicales depuis leur officine. Ce service nécessite la mise à disposition de matériel adapté (vidéotransmission avec le praticien et certains objets tels qu’un tensiomètre, un oxymètre, un stéthoscope et otoscope connectés), le tout dans un local confidentialité (voir arrêté du 2 septembre 2019 et site ameli.fr).
Les téléconsultations ont bondi durant la crise sanitaire. Durant les mois de mars et avril 2020, plus de 5 millions de téléconsultations ont été enregistrées par l’Assurance Maladie (contre quelques milliers par semaine au préalable).
Le télésoin est une forme de pratique de soins à distance, utilisant les technologies de l’information et de la communication. Il met en rapport un patient avec un ou plusieurs pharmaciens ou auxiliaires médicaux dans l’exercice de leurs compétences. On peut imaginer qu’à terme le pharmacien puisse effectuer un entretien pharmaceutique ou un bilan de médication par ce moyen.