Les missions de premier ordre
Le pharmacien contribue aux soins de premiers recours, tels que définis dans le code de la santé publique (L. 1411-11) :
- La prévention, le dépistage, le diagnostic, le traitement et le suivi des patients ;
- La dispensation et l’administration des médicaments, produits et dispositifs médicaux, ainsi que le conseil pharmaceutique ;
- L’orientation dans le système de soins et le secteur médico-social ;
- L’éducation à la santé.
Les soins de premiers recours
Suite à la publication de l’arrêté du 1ᵉʳ août 2016 déterminant la liste des tests qui ne constituent pas un examen de biologie médicale, et la mise à jour par l’arrêté du 21 mai 2024, les pharmaciens d’officine sont autorisés à réaliser, dans un espace de confidentialité, quatre tests de dépistage :
- Test de dépistage de la grippe, de la COVID-19, ou encore des infections à VRS ;
- Test de dépistage du diabète, lors des campagnes de dépistage ;
- Test rapide d’orientation diagnostique des angines streptococciques (TROD) ;
- Test urinaire de recherche a minima de nitriturie et de leucocyturie.
Détection du streptocoque du groupe A
Courant 2019, le Ministère de la santé a réuni les acteurs de la profession afin de mettre en œuvre la généralisation et le remboursement des TROD angine à l’officine pour la maîtrise de l’antibiorésistance. En effet, rappelons que dans 70 à 90% des cas, les angines sont d’origine virale chez l’adulte et ne nécessitent donc aucune antibiothérapie.
Depuis le 1ᵉʳ janvier 2020, le pharmacien renforce son implication dans la lutte contre l’antibiorésistance. En effet, pour éviter la dispensation d’un antibiotique dans le cas d’une angine virale, il est en mesure de réaliser un test rapide d’orientation diagnostique (TROD) oropharyngé à streptocoque du groupe A.
La réalisation de ce test peut se faire dans deux situations :
- Sur proposition du pharmacien, après évaluation des critères cliniques, chez les patients de plus de 10 ans.
- Sur prescription d’un médecin, à l’issue d’une consultation médicale (dispensation conditionnelle).
Dans le premier cas, un patient (sans critères d’exclusion ni de signe de gravité) se présente à l’officine avec des symptômes évoquant une angine. Moyennant une anamnèse du patient, et un score de Mac Isaac supérieur ou égal à 2 chez les patients de plus de 15 ans, il pourra entreprendre la réalisation d’un TROD à streptocoque du groupe A (voir logigramme).
Dans le second cas, le TROD est réalisé à l’issue d’une consultation médicale, et sa positivité conditionne la délivrance de l’antibiotique prescrit par le médecin.
Seuls les pharmaciens formés à la réalisation d’un test rapide oro-pharyngé d’orientation diagnostique des angines à streptocoque du groupe A peuvent procéder au prélèvement. Il faut par ailleurs veiller au respect du cahier des charges en termes de locaux et de matériel (Arrêté du 29 juin 2021). À l’issue de l’obtention du résultat, le pharmacien doit remettre au patient une fiche de traçabilité qui accompagne le résultat.
Enfin, et depuis l’Arrêté du 17 juin 2024, les pharmaciens d’officine qui ont suivi une formation adaptée, peuvent prescrire une antibiothérapie adaptée au patient. À noter que l’azithromycine n’est plus préconisée dans le traitement de l’angine bactérienne.
Des documents professionnels sur les TROD angine à l’officine, élaborés par des groupes de travail pilotés par la DGS sont disponibles depuis février 2020 sur le site du CESPHARM.
Détection de nitrites et de leucocytes dans les urines
Au même titre que les angines, les pharmaciens sont désormais en mesure de prendre en charge les cystites simples de la femme âgée de 16 à 65 ans. En effet, l’arrêté du 28 novembre 2023 a accordé la prise en charge des tests urinaires recherchant à minima les nitrites et les leucocytes, dans l’objectif de permettre une orientation diagnostique chez les femmes présentant des signes fonctionnels urinaires.
Les femmes peuvent venir soit spontanément avec des symptômes évocateurs, et il revient au pharmacien de mener une anamnèse adptée pouvant conduire à la réalisation d’une bandelette urinaire. Elles peuvent par ailleurs présenter une ordonnance conditionnelle, où la dispensation de l’antibiothérapie sera conditionnée à l’obtention d’une bandelette urinaire positive.
Un second arrêté, publié le même jour, a permis au pharmacien de dispenser un antibiotique recommandé dans le cadre des cystites simples de la femme (fosfomycine trométamol ou pivémicillinam). À noter que cet antibiotique ne peut être dispensé qu’à l’issue du strict respect du logigramme, et donc après exclusion des facteurs d’exclusion et l’obtention d’une bandelette urinaire positive.
Comme pour la prise en chage des angines, les pharmaciens sont tenus de suivre une formation certifée avant de pouvoir proposer ce nouveau service.
La coopération entre professionnels de santé
La coopération entre professionnels de santé est centrale et essentielle, car toute activité du pharmacien au service du patient ou de la santé publique n’a de sens que si elle est reliée à un principe général qui pourrait s’énoncer ainsi : « travailler ensemble au service du patient ».
À cette fin, le pharmacien dispose de plusieurs outils.
En tout premier lieu, le dossier pharmaceutique (DP), qui est un parfait outil de coopération, de sécurisation, et de coordination entre les professionnels de santé. En effet, sur ce document électronique figure l’historique médicamenteux quadrimensuel, ce qui en fait un instrument de lutte contre l’iatrogénie et sécurise la dispensation des médicaments, à la fois en ville comme à l’hôpital. Y figure aussi l’historique vaccinal, qui reste visible 21 ans, et qui rend le DP indispensable à la prévention de grandes maladies infectieuses et tend à améliorer la couverture vaccinale. La loi d’accélération et de simplification de l’action publique a rendu l’ouverture du dossier pharmaceutique automatique en 2023 (Ministère de l’intérieur).
Le DP est désormais intégré dans “Mon espace santé“. Véritable carnet de santé numérique, il permet aux professionnels de santé, mais également au patient lui-même, d’alimenter le dossier d’un individu. Il s’agit de l’évolution et de la transformation du dossier médical partagé (DMP), lancé à l’automne 2018. Disponible pour tout citoyen français, Mon espace santé permettra, en plus des outils du DMP améliorés, l’accès à une messagerie sécurisée, à un agenda de santé, au catalogue de services numériques de santé, etc. Le patient sera maître de ses informations médicales, et pourra octroyer un droit d’accès plus ou moins restreint selon le professionnel de santé considéré. À terme, figureront sur cet espace numérique les ordonnances, analyses biologiques, compte-rendus médicaux, vaccinations, etc.
Afin de préserver ce secret professionnel et favoriser les échanges entre professionnels de santé, le pharmacien s’assure d’utiliser pour ces échanges, une messagerie sécurisée de santé qui permet des échanges d’informations protégés avec l’accord du patient (par exemple Mailiz®, proposée par les Ordres professionnels ou MonSisra).
Ces messageries sécurisées sont par exemple obligatoires dans le cadre de l’exercice pluriprofessionnel qui se développe de plus en plus en équipes de soins primaires (ESP), en maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP), voire en communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). Le pharmacien a en effet toute sa place dans ces structures qui travaillent sous l’égide et le financement de l’Agence régionale de santé et participent de manière coordonnée à toutes les missions précédemment définies à travers la rédaction d’un projet de santé élaboré pour un territoire donné ou pour une patientèle donnée. L’objectif est bel et bien de décloisonner les différents professionnels de santé pour permettre une prise en charge la plus globale du patient, et ainsi faciliter son parcours de soins. Cette thématique a fait l’objet d’un cahier de l’Ordre qui dresse le constat de la coopération interprofessionnelle.
La permanence des soins
Une des missions de cet exercice pluriprofessionnel est de rendre possible la permanence des soins. Toute personne doit pouvoir, à tout moment, bénéficier des soins de professionnels de santé organisés pour assurer la permanence de ces soins. Dans ce cadre, le pharmacien d’officine participe en particulier au service de garde. En outre, sa répartition démo-géographique exemplaire, ses compétences en conseils en santé et sa disponibilité en libre-accès sont un garant de cette permanence des soins.
Ces services peuvent s’effectuer à volets ouverts ou fermés (choix du titulaire) ou sous forme d’astreintes.
L’organisation des services de garde et d’urgence est régie par les organisations départementales représentatives de la profession ou par le DG de l’ARS dont l’intervention est prévue dans les trois cas suivants :
- Absence d’accord des organisations représentatives ;
- Désaccord d’un pharmacien titulaire concerné par les services de garde et d’urgence ;
- Ou si l’organisation retenue ne permet pas de satisfaire les besoins de santé publique.
Toutes les officines ont l’obligation de participer aux services de garde et d’urgence. Ce service étant organisé pour répondre aux besoins et aux demandes urgentes en dehors des jours et heures d’ouvertures généralement pratiqués par les officines, les pharmaciens ne peuvent pas refuser ou s’abstenir de participer à ce service, sauf décision contraire prise par arrêté préfectoral.
Le pharmacien d’officine doit veiller à porter à la connaissance du public, par voie d’affichage, soit les noms et adresses de ses proches confrères en mesure de procurer aux malades les médicaments et secours dont ils pourraient avoir besoin, soit ceux des autorités publiques habilitées à communiquer ces renseignements.
Consulter : Rémunération des gardes
Actions de veille et de protection sanitaire
Le pharmacien doit aussi concourir aux actions de veille et de protection sanitaire. Dans ce cadre, il participe à des actions de protection collective de la population dans le cadre d’épidémies, d’accidents chimiques ou nucléaires de manière coordonnée avec les autorités compétentes.
Le pharmacien est tenu de déclarer les potentiels effets indésirables liés à des médicaments (pharmacovigilance, pharmacodépendance), des dispositifs médicaux (matériovigilance) ou d’autres produits de santé (cosmétovigilance, nutrivigilance). Ceci constitue une obligation légale.